Éditoriaux

Il est temps

Début mai, une travailleuse sociale était tuée par un homme désespéré qu’elle venait visiter dans le cadre d’un accompagnement personnalisé. Pas d’hommage national cette fois, pas de grandes déclarations de ministres, d’emballement médiatique… Il n’a pas été choisi d’en faire un sujet polémique.

On pourrait se satisfaire d’une certaine « retenue », de ne pas voir de « pulsion politique » comme on en a trop l’habitude après les faits divers. Mais ce silence laisse tout de même un goût amer.

Cette fois-ci les circonstances ne peuvent pas prêter aux élucubrations sécuritaires et stigmatisantes autour de l’islam, de l’immigration, de la délinquance ou de la banlieue, du laxisme… Non, cette fois il faut faire face à la réalité : ce dont on crève en France, c’est de la misère, de la détresse, de la perte de sens jusqu’à perdre la tête pour certains. Chacun est poussé dans ses retranchements, la colère et la douleur s’enkystent et, rarement heureusement, jaillissent à la face du monde au travers des pires actes.

« […] Ce dont on crève en France, c’est de la misère, de la détresse, de la perte de sens jusqu’à perdre la tête pour certains. […] »

Bien sûr la crise sanitaire, sa gestion et leurs conséquences ne sont pas innocentes mais n’agissent qu’en amplificateur. C’est le système capitaliste qui exploite, domine, aliène. Les politiques menées ces dernières décennies ont instillé et exacerbé la compétition partout dans nos vies, de la crèche à l’EHPAD. En détricotant systématiquement les services publics, elles font en plus disparaître les seules soupapes qui préviennent ou désamorcent les situations trop compliquées.

Moins de professeurs et de personnels de l’éducation, moins de médecins et de personnel de santé, moins de postiers mêmes… Moins de place pour la relation humaine surtout dans ces métiers sous pression. Ajoutez à cela le secteur de la psychiatrie qui a été dévasté malgré l’explosion des besoins et les travailleurs sociaux se retrouvent donc souvent dernier rempart et désemparés face à des situations extrêmes.

Les travailleurs du social et médico-social, « les oubliés du Ségur » ou « les invisibles » comme ils se nomment, sont la bouée qui maintient à flot les plus fragiles et tente de les accompagner pour trouver leur place dans une société malade de son inhumanité. Ils et elles travaillent en plus dans des conditions souvent bien difficiles, et sont pourtant sous-payés et très peu considérés.

La question est donc : quand va-t-on inverser la vapeur ? Quand va-t-on enfin soutenir les travailleurs sociaux, leur donner les moyens de remplir leurs missions ? Rémunération, embauches massives, formation… leurs revendications résonnent bien sûr avec celles d’autres secteurs. Une nouvelle journée de mobilisation nationale du social et du médico-social aura lieu le 1 5 juin.

Dans la Vienne, la grève s’étalera même sur 3 jours… car si les politiques nationales sont en cause, les départements ont un rôle clé dans ce secteur et il va sans dire que le conseil départemental de la Vienne, tenu depuis toujours par la droite, ne fait pas figure de bon élève. Il est grand temps que cela change !

Hugo Blossier

Secrétaire départemental du PCF

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