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GRAND POITIERS : pour un service public des déchets – intervention à propos du SIMER

Intervention de Laurent Lucaud, Vice-Président de Grand Poitiers en charge de l’eau et de l’assainissement à propos du SIMER et de son centre public de tri des déchets installé à Sillars.

Madame la Présidente, M. le Vice-président, chers collègues,

Je profite du rapport qui nous est présenté pour attirer votre attention sur le SIMER et en particulier sur son centre public de tri des déchets installé à Sillars sur la communauté de commune de Vienne et Gartempe. Vous le savez certainement : il est menacé. La raison à cela, c’est qu’il existe un deuxième site en DSP pour Grand Poitiers — exploité par SUEZ — mais qu’aucun des deux ne sera en mesure de traiter des quantités toujours plus importantes de déchets dans les années à venir. Il faut donc réaliser d’importants investissements qui ne pourront être concentrés que sur l’un des deux centres, amenant potentiellement à la perte de l’autre. Poussé par des logiques économiques, il est très probable que le choix du destinataire des investissements sera à la faveur du centre privé.

Je m’explique :

La loi Grenelle 2 (de 2010) a introduit une obligation pour les entreprises d’internaliser le coût du recyclage des produits qu’elles vendent. Ainsi, les industriels passent un contrat avec un éco-organisme (qui est un statut de droit privé) qui leur accorde un label en échange d’une taxe qui servira à recycler les emballages des produits vendus. C’est cette taxe qui permettra de financer les investissements que j’évoquais précédemment.

Dans notre cas, c’est Citéo qui décidera de l’affectation des investissements. Citéo est donc un éco-organisme privé à but lucratif, fruit de la fusion en 2017 d’Eco-Emballages et d’Ecofolio. En novembre 2020, elle adopte le statut d’ « entreprise à mission », qui est consacré par la loi PACTE de 2019 et qui « désigne les nouvelles formes d’entreprise qui se donnent statutairement une finalité d’ordre social ou environnemental en plus du but lucratif. »

Vous imaginez bien que la vocation lucrative de Citéo la poussera nécessairement à adopter la solution la moins coûteuse qui lui sera proposée (sans doute par SUEZ), au détriment des conditions sociales ou environnementales.

Si les logiques à l’œuvre nous dépassent, et de loin, nous pensons qu’il est fondamental que Grand Poitiers joue son rôle de collectivité centrale dans le département pour aider le SIMER. Nous avons tout intérêt à sauver un service public des déchets.

« Pourquoi payer plus cher pour réaliser la même mission ? » peut-on s’interroger. Ce schéma de pensée — aussi pragmatique semble-t-il — omet bien des éléments. D’abord, l’un des intérêts premiers du service public, c’est d’établir une référence en termes de coûts réels. Si demain le SIMER n’existait plus et que seul un centre privé était en charge du tri des déchets, imaginons la liberté dont disposerait l’entreprise pour fixer les prix.

Ensuite, Citéo a été créée par les entreprises de la grande consommation et de la distribution. Le conseil d’administration est donc composé pèle-mêle de représentants de Coca-Cola, D’Aucy, Lactalis, Nestle Waters France, Eaux Minérales d’Evian, Carrefour ou Auchan du groupe Mulliez / Decathlon pour ne citer qu’eux. Une question simple : croyez-vous chers collègues que ces entreprises ont intérêt à ce que nous réduisions notre consommation d’eau en bouteilles ou de yaourt en pots plastique ? Absolument pas. En revanche, elles ont tout intérêt à affirmer être en mesure d’en recycler une part toujours plus importante.

Une maxime bien connue dit : « les meilleurs déchets sont ceux que l’on ne produit pas ». Il faut donc consommer différemment pour tendre vers le zéro déchet. C’est précisément ce à quoi œuvre le SIMER en proposant par exemple : des couches et des protections hygiéniques réutilisables, des composteurs ou des matériels à la location pour des évènements, et tout ça à des prix qui défient toute concurrence ! Le SIMER c’est aussi un accompagnement personnalisé des particuliers, des entreprises, des associations pour un changement de pratiques. Par exemple, vous pouvez actuellement vous inscrire au programme « zéro déchets verts » qui vous permettra d’avoir un diagnostic sur vos pratiques, des ateliers, des formations, des conseils personnalisés. Enfin, le SIMER, sur son seul volet pédagogique intègre aussi un lieu d’animation sur site qui permet de recevoir des classes et d’éduquer les enfants aux bonnes pratiques, mais aussi d’informer la population sur le traitement de déchets.

Nous sommes bien conscients des problèmes autour du SIMER, et si nous étions aux commandes, nous n’aurions pas pris certaines décisions, notamment celle de la redevance incitative.

Chers collègues, je vous le dis : le service public C’EST la protection des environnements ! Et à ce titre, le SIMER doit faire l’objet de toutes nos attentions.

Je ne maîtrise évidemment pas tous les aspects de la gestion des déchets sur la collectivité, alors je vais conclure mon propos par deux questions. Il est fondamental que Grand Poitiers garde la main sur sa politique de gestion des déchets. De même, nous ne pourrons ni outrepasser nos compétences, ni assumer les mauvais choix passés d’autres collectivités. Cependant, quelle place accorderons-nous à la coopération avec les EPCI voisins à moyen et long terme dans la gestion des déchets ? Et surtout, outre le cas particulier du SIMER, comment y intégrera-t-on du service public (dont vous aurez perçu la nécessité à travers nos propos) ?

Je vous remercie.

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