Éditoriaux

Priorités

Illustration : Lisa Avril

Envie de travailler avec le sourire, avec des horaires de fonctionnaire et un salaire de ministre ?” Affichée sur plusieurs panneaux publicitaires, l’annonce d’un carrossier châtelleraudais à la recherche de plusieurs employé.e.s aurait presque de quoi faire sourire… Si bien sûr des millions de fonctionnaires (20% des emplois en France sont dans le secteur public, pas tous fonctionnaires malheureusement) ne travaillaient pas davantage de nuit et le dimanche que les salariés du privé, pour un pouvoir d’achat qui a baissé de 500€ par mois en moyenne depuis 1983, et dans des conditions parfois extrêmement difficiles.

Mais intéressons nous à la situation actuelle de pénurie de main d’œuvre révélée ici. D’après l’INSEE, 44% des chefs d’entreprises (chiffres qui ne tiennent donc pas compte des besoins de nombreux services publics ou privés) disent rencontrer une difficulté de recrutement contre 30% habituellement sur les 30 dernières années.

Le patronat et la droite sont ravis. Ils peuvent ainsi survendre le “rebond de croissance” qui indiquerait que “la crise est derrière nous”, tout en planifiant de faire payer le prix fort aux travailleurs avec une austérité aggravée pour les 5 prochaines années et des profits dopés pour les capitalistes. Ils peuvent ainsi rappeler à qui veut l’entendre que de nombreux emplois sont non pourvus, montrer alors du doigt les chômeurs fainéants qui refuseraient de travailler, faire pression sur les salaires, les conditions de travail et les droits de tou.te.s les travailleur.ses et réduire le problème du chômage à la seule adéquation de la formation de la main d’œuvre aux emplois disponibles (alors que 21% de la population active est en situation de non-emploi ou de sous-emploi pour 300 000 emplois qui seraient disponibles). Au passage ils promeuvent une formation professionnelle, voire un système éducatif, tout tournés vers la satisfaction des besoins en main d’œuvre du patronat. Ainsi c’est tout le sujet de l’emploi qui est renvoyé à la responsabilité individuelle du travailleur plutôt qu’à des choix politiques et des logiques économiques… à remettre en cause !

Alors que le plan de relance prévoyait à peine 1% de ses dépenses pour la formation professionnelle, Jean Castex en visite au centre AFPA de Châtellerault ce 27 septembre pour une coûteuse opération de communication, venait annoncer le déblocage d’1,4 milliards d’euros pour la formation en réponse aux fameux emplois non pourvus en France. Mais cette rustine ne répondra pas durablement aux besoins car le gouvernement continue dans le même temps de détruire méthodiquement la formation initiale, scolaire et universitaire et persévère avec sa réforme antisociale de l’assurance chômage.

mener la bataille politique, au cœur de l’affrontement de classe, pour que l’emploi, la formation et la recherche soient la priorité

Derrière les discours sur la souveraineté économique et la relocalisation, les stratégies du capital accompagnées par le gouvernement accélèrent en réalité la désindustrialisation, la perte de capacité productives, de compétences, le démantèlement de filières stratégiques… ce qui nous empêche de relever le défi écologique et de la satisfaction des besoins, provoque la disparition massive d’emplois privés et publics et contribue ainsi à priver la protection sociale de recettes.

Pourtant les besoins d’emploi, de compétences, de services publics, de nouvelles productions, de progrès technologiques sont réels à Châtellerault comme ailleurs. Cela nécessite de mener la bataille politique, au cœur de l’affrontement de classe, pour que l’emploi, la formation et la recherche soient la priorité pour répondre aux besoins et sortir des crises sociale, écologique et démocratique. Le potentiel émancipateur de notre proposition de sécurité de l’emploi et de la formation est immense, pour sortir le travail du marché et des rapports de domination (capitaliste, patriarcale et raciste) dans lequel il est enfermé.

Nous en faisons naturellement une priorité, en participant aux mobilisations de cette rentrée sociale et en alimentant le débat : nous donnons rendez-vous à Châtellerault le 19 octobre pour une première Rencontre des Jours Heureux qui y sera consacrée.

Hugo Blossier,

Secrétaire départemental

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