Lors du conseil municipal du 29 mars 2021, Kentin Plinguet a présenté le vœu portant sur l’ouverture du RSA aux jeunes, sans conditions supplémentaires. Un vœu voté par 47 des 53 conseiller.e.s municipaux.ales.
L’intervention :
“Lors du Conseil municipal d’octobre dernier j’avais au nom de la majorité et au cours d’une prise de parole assuré de notre soutien à la mesure – largement portée dans notre pays – qui vise à ouvrir le Revenu de Solidarité Active (RSA) sans conditions supplémentaires aux jeunes de moins de 25 ans. Aujourd’hui, je suis fier de porter auprès du Conseil municipal de la ville de Poitiers le vœu que vous avez sous les yeux relatif à l’ouverture de nouveaux droits sociaux dès 18 ans.
La situation générale des jeunes, détachée de la situation sanitaire est grave. Plus de deux millions des moins de 30 ans vivent sous le seuil de pauvreté fixé à 885 euros. Les jeunes représentent 50% des Français.e.s vivant sous ce seuil alors qu’il.elle.s ne sont qu’un tiers de la population globale. La crise sanitaire, qui a aggravé la crise sociale présente depuis des années en France, ne fait qu’empirer la situation, et dans le même temps prive les jeunes d’une perspective claire d’avenir. Le fameux marché de l’emploi est sursaturé, et l’arrivée de 750 000 jeunes sur celui-ci ne fera qu’accroître les difficultés à l’insertion professionnelle. Plus que jamais, il est nécessaire que la Nation déploie un véritable filet de sécurité pour la jeunesse.
Prenons un exemple : Rémi, poitevin de 20 ans est déscolarisé depuis ses 16 ans. Sans diplôme et après un service civique de 6 mois, il a réussi à intégrer le dispositif de la Garantie jeune. La Garantie jeune s’est terminée et il ne fait pas partie de ceux.elles en situation de sortie positive. Il est donc privé d’emploi et sans formation et n’a pas pu cotiser suffisamment pour avoir le droit à une allocation. Cependant, Rémi aimerait pouvoir rebondir et il faut le dire, payer ses factures et son loyer qui représentent une charge importante. Le RSA qui sert de filet de sécurité aux plus de 25 ans, lui est fermé actuellement car il n’a pas travaillé 3214 heures soit deux années à temps complet sur les trois dernières années. Et encore, Rémi est un chanceux : il est parvenu à trouver un service civique et à être pris parmi les actuel.le.s 100 000 jeunes à bénéficier de la Garantie jeune.
Malheureusement, la Garantie jeune n’offrira que 200 000 places en 2021 et ne fait pas l’objet d’un engagement financier suffisant. Elle n’est par ailleurs pas renouvelable, elle dure une année, et ne peut être poussée à 18 mois que dans certains cas précis. Surtout, il s’agit d’un dispositif d’accompagnement à l’insertion professionnelle, ce n’est pas un minima social, et cela ne doit pas le devenir. Ici s’échoue l’égalité des chances promise par la nation. Là où il y a une volonté, il est censé y avoir un chemin, malheureusement, les jeunes précaires, aussi volontaires soient-il.elle.s, n’ont pas accès à ce chemin.
Alors que fait la Nation pour notre jeunesse ? Rien. Et le gouvernement qui en avait fait l’une de ses nombreuses priorités, reste sourd aux appels à ouvrir le RSA aux moins de 25 ans sans conditions supplémentaires basées sur l’âge. Ces appels lancés nationalement par les organisations, comités et fondations, tels que le CNAJEP, le Forum Français de la jeunesse, la fondation Abbé Pierre, ou encore par 14 organisations et syndicats de jeunesse, ont trouvé écho chez des député.e.s et sénateur.rice.s progressistes, et on fait l’objet de deux propositions de loi rejetées en bloc par la droite parlementaire et marchante. Une troisième proposition de loi sera débattue le 6 mai prochain à l’Assemblée nationale.
Localement, un appel à l’initiative du MJCF86 rassemblant les Jeunes Génération.s, l’Union des Étudiants Communistes, Soror, et Solidaire Étudiant-e-s, a interpelé les parlementaires et les collectivités locales. Nous les avons rencontré.e.s et échangé avec eux.elles. Pour il.elle.s, comme pour nous, un pays qui abandonne sa jeunesse, est un pays qui se prive de son avenir. Parce que pour nous, c’est l’égalité des droits qui doit primer. Droits qui doivent être les mêmes pour tou.te.s, parce que la ville de Poitiers est une ville de jeunesse qui est aussi frappée par la précarité, parce que la ville ne peut pas rester muette sur des sujets aussi importants que la justice sociale, parce que le plan jeunes exclut encore trop de jeunes de ses dispositifs. Bien que n’étant pas l’alpha et l’oméga d’une politique jeunesse, l’ouverture du RSA pour les moins de 25 ans représente un filet de sécurité nécessaire pour éviter qu’un trop grand nombre de jeunes ne se retrouvent dans l’extrême pauvreté.
Certain.e.s pensent que cette ouverture serait une trappe à inactivité. Mais personne ne s’épanouit dans l’inactivité contrainte. L’ouverture du RSA aux moins de 25 ans ne fera renoncer ces dernier.e.s à suivre une formation pour occuper un emploi derrière, au contraire. Ce minima social peut permettre de faire sortir d’une logique de survie un grand nombre de jeunes plongé.e.s dans la misère ou la dépendance familiale, pour leur permettre de construire leur avenir.
Selon les différents appels, ce revenu représenterait entre deux et trois milliards. Pour rappel, trois milliards c’est le manque à gagner qu’entraîne la disparition de l’ISF chaque année. Une somme dérisoire, donc, si j’en crois le gouvernement, mais tellement essentielle pour un grand nombre de jeunes.
Nous, villes de Poitiers, portons donc le vœu que le revenu de solidarité active (RSA) soit ouvert aux moins de 25 ans, sans conditions spécifiques liées à l’âge. Nous irons porter ce vœu auprès des parlementaires du territoire. Enfin, nous en profitons pour rappeler aux jeunes que toujours nous les soutiendrons lorsqu’il.elle.s se mobilisent, pour leurs droits, pour plus de justice sociale, comme le 16 mars dernier ou le 8 avril prochain.
Mes cher.e.s collègues, en votant pour ce vœu, vous aidez les jeunes à construire l’avenir dont elle.ils ont besoin, vous leur enverrez aussi le message que la municipalité de Poitiers est de leur côté et qu’elle en fait une réelle priorité.”