Lors de la réunion publique du Conseil Départemental du 23 septembre 2022, une délibération était présentée, proposant d’octroyer deux subventions en un seul vote : 1.8 millions d’euros pour l’Université de Poitiers, et 1.2 millions d’euros pour l’installation d’une école privée au Futuroscope. La délibération comprenant une subvention très attendue pour l’Université de Poitiers, les élu·e·s du groupe La Vienne en Transition se sont abstenu·e·s. Florence Harris a pris la parole pour dénoncer la démarche et rappeler la nécessité d’un enseignement supérieur public.
“Je dois reconnaitre que cette délibération présentée de la sorte est très habile de votre part. D’un côté, vous proposez 1.8 millions d’euros pour l’Université de Poitiers (ce dont nous nous réjouissons) et de l’autre vous octroyez 1.2 millions d’euros pour une école privée qui vient directement en concurrence. Illustration parfaite du « en même temps » dont nous nous acharnons à dénoncer le leitmotiv : la fragilisation du service public au profit du privé.
En même temps on organise le dépérissement du service public, en même temps on dénonce l’absence de réponse adéquate aux besoins, finalement on finance un service privé au motif d’une « complémentarité » pour faire passer la pilule.
Ce qui est gros, en l’occurrence, c’est que L’ESIGELEC propose deux formations qui seront en concurrence frontale à deux masters de l’Université de Poitiers. Ces formations étant ouvertes à l’alternance, elles vont donc intéresser les mêmes entreprises, ce qui va poser un problème d’accueil pour les étudiants et amoindrir les ressources financières pour les formations publiques et la recherche associée.
Il n’y a pas de « complémentarité ». La concurrence est bien réelle et l’ensemble des organisations syndicales représentatives de l’Université de POITIERS alertent sur la question depuis avril. Le conseil plénier de l’UFR SFA (Unité de Formation et de Recherches de Sciences Fondamentales et Appliquées) le 17 mai dernier a lui-même voté à l’unanimité une motion contre l’implantation de l’ESIGELEC, pour ces raisons. La question de l’encadrement des étudiants au sein de l’école privée est aussi posée, celle de la qualité de l’unité de recherche qui serait associée… Mais pour le savoir, il faudrait prêter l’oreille aux personnels et représentants de l’Université.
L’enseignement privé répond à un besoin de compétences plus ou moins ponctuel du capital, pour sa mise en valeur. L’enseignement supérieur public répond quant lui à un besoin de formation et de recherche pour répondre aux enjeux de société. C’est aussi l’égalité et l’émancipation, pour permettre à tou·te·s les jeunes de s’approprier les savoirs complexes qui leur seront nécessaires pour être ensuite, dans leur vie d’adultes, pleinement citoyens, dans la cité, dans leur entreprise, pour prendre les décisions auxquelles ils et·elles seront confronté·e·s.
En soutenant ce projet d’école privée, les collectivités territoriales fragilisent l’université de Poitiers. Elles fragilisent ses relations tissées avec l’environnement économique local, ses formations, ses laboratoires. Chaque euro versé par une collectivité en soutien à la concurrence au service public est un euro de trop.
Non, privé et public ce n’est pas pareil comme le laisse entendre cette délibération. Et comme nous voulons le meilleur pour l’avenir du pays nous choisissons l’université publique.”