Notre rédaction partage dans son intégralité la lettre ouverte du Collectif Femmes Violentées de la Vienne et du Collectif 8 mars.
Vendredi 24 octobre 2025
Aujourd’hui nous communiquons afin d’informer sur ce que vivent une femme et son enfant de 5 ans. Nous la nommerons Sonia. Le Collectif Femmes Violentées de la Vienne a été contacté par Sonia en juillet 2025 car elle se sentait en danger, et pour cause, son ex-conjoint est un homme violent, dangereux et refuse la séparation du couple. Elle possédait déjà un Téléphone Grave Danger (TGD), délivré sur ordre de la justice par l’association France Victime. Cet homme a déjà tenté de l’étrangler, lui a brisé la mâchoire, cassé les dents, fait du chantage au suicide, et la traque telle une proie. Il est actuellement sous le joug d’une peine de prison ferme.
Son profil est très inquiétant : accolé au contexte de séparation et du fort contrôle coercitif qu’il exerce, ses menaces de mort ressemblent à des promesses. Le Collectif Femmes Violentées de la Vienne a informé le Procureur de la République de Poitiers de la situation. Quatre jours après, Sonia obtient une ordonnance de protection et l’autorité parentale exclusive. Cela veut dire que la justice interdit à Monsieur d’entrer en contact avec Sonia et leur enfant. Or, Monsieur n’a que faire des décisions de justice et le dit lui-même, il fait ce qu’il veut, la justice c’est lui. Il a communiqué une fausse adresse dans un autre département, ce qui empêche les autorités de le notifier de l’ordonnance de protection qui n’est donc pas valable, il le sait : le droit le protège. Il a continué à terroriser Sonia en la suivant sur son lieu de vacances quelque part en Europe. Alors qu’elle était dans son hôtel, elle s’est retrouvée face à lui, menaçant et complètement satisfait de son effet de terreur choisi et prémédité. Il s’est alors fait arrêter par les autorités et s’est vu notifier une interdiction de contact dans ce pays. De retour en France, il a continué.
Monsieur est là, partout, constamment, il rode, espionne par tous les moyens et menace. Il ne lâche pas sa proie. Cela s’inscrit dans un continuum de violences pour rappeler à Sonia qu’elle n’est pas libre de ses faits et gestes. Les policiers se déplacent à de nombreuses reprises, chaque fois que Sonia déclenche le téléphone grave danger ou qu’elle appelle le 17. Les policiers lui ayant conseillé de faire le 17 qui serait plus efficace que le TGD, alors Sonia fait les deux, à chaque fois ! Les forces de l’ordre poitevines ont convoqué Monsieur en garde à vue.
Tranquillement, il les a rappelées en précisant qu’il les tiendrait au courant de ses disponibilités, chose qu’il n’a jamais faite. Un mandat de recherche est alors délivré à son encontre. Alors que Monsieur le terroriste patriarcal était déjà sous le joug d’une condamnation à une peine de 5 mois de prison ferme pour des violences envers Sonia et dont la peine devait être aménagée, suite à tous ces nouveaux éléments, le juge d’application des peines convoque Monsieur, qui derechef brille par son absence. Le juge décide de rejeter l’aménagement de peine et prononce une peine ferme a exécuter à la prison de Vivonne. Ce dimanche 19 octobre, cet homme a téléphoné via un numéro masqué à Sonia. Elle a décroché pensant que c’était probablement les forces de l’ordre. Monsieur a alors demandé à voir l’enfant alors qu’il sait qu’il en a perdu le droit. Monsieur s’est montré menaçant, a fait des insinuations : « s’il y a un nouveau procès je ne m’y présenterai pas, sinon ils vont m’enfermer. De toute façon je ne serai plus là », laissant planer le suspens sur ses intentions. Le lendemain, elle l’a vu autour de son domicile.
Le Collectif Femmes Violentées de la Vienne en a informé aussitôt le bureau de la Procureure de Poitiers qui a répondu prendre en compte l’urgence. C’est une torture psychique pour Sonia dont la santé se dégrade. Monsieur mène tout le monde par le bout du nez en même temps qu’il poursuit sa vindicte. Tout ceci scandalisera la majorité d’entre vous mais la réalité, c’est qu’il n’y a rien de nouveau à ces agissements. En attendant, femmes et enfants se meurent avant de peut-être carrément être tuée·s.
À cet instant et depuis des semaines, Sonia se demande :
« Me laisserez-vous être la prochaine ? »
« J’ai peur d’être assassinée et peur de laisser mon enfant »
Sonia a fait tout ce qu’on lui a demandé, les plaintes, les appels d’urgence, France victime, les associations, l’avocate, déménager, changer l’école, les rendez-vous psy, et même solliciter le Préfet, etc. Il a fallu que son avocate, le Collectif 8 Mars, des élu-es municipaux, les services du Préfet, ainsi que le Collectif Femmes Violentées de la Vienne se mobilisent toutes et tous afin de signaler et enclencher des procédures qui demandent de la connaissance, de l’expertise, du temps, énormément d’énergie et de pugnacité. Le Collectif Femmes Violentées de la Vienne communique depuis 4 ans avec le bureau du Procureur de la République de Poitiers. La Procureure, Madame Bray, arrivée en septembre dernier, nous a demandé de l’aider à comprendre « où sont les trous dans la raquette ? », en réaction aux quatre féminicides connus du public dans la Vienne depuis mars 2025.
Nous les citons :
– Agathe Hilairet, 28 ans qui voulait faire un jogging,
– Véronique Revaud, 55 ans qui aspirait à retrouver une vie paisible,
– Inès Mecellem, 25 ans qui a voulu aider cet homme et avait toute la vie devant elle,
– Célia Queuffeulou qui voulait voir grandir ses jumeaux de 6 mois (l’enquête pour meurtre est en cours).
Toutes ont vécu la terreur avant d’être tuées par des hommes qui ont choisi et décidé de s’approprier et d’ôter leurs vies en les massacrant. Nous voulons rappeler qu’il n’y a pas que le féminicide qui est condamnable. Il y a le harcèlement, les menaces de mort, le gaslighting (retournement de cerveau), la mise en danger, les violences physiques, psychologiques, sexuelles, financières et administratives, sont autant de motifs pour saisir la Justice et pour protéger les victimes et arrêter les agresseurs. Toutes ces infractions constituent le contrôle coercitif qui est l’anti-chambre du féminicide. C’est ce que vivent insupportablement Sonia et beaucoup d’autres…
Par cette lettre, nous espérons contribuer à faire avancer la lutte contre les violences faites aux femmes et leurs enfants. Nous espérons sensibiliser les mentalités afin que les actions suivent et ne restent pas des décisions administratives sans effet. Madame La Procureure, Messieurs les commandants de police et gendarmerie, politiques, travailleuses et travailleurs du social, médecins, infirmières, psychologues, avocat-es, citoyennes et citoyens, nous vous laissons voir où sont les trous et juger des suites à mener.
Respectueusement.

