Arthur est un militant communiste assez connu dans le tissu politique et associatif poitevin. De par ses responsabilités au sein des structures militantes et sa présence sur le terrain, il n’est pas rare de le croiser dans les nombreuses mobilisations qui rythment notre département. Ce camarade est un enfant du pays châtelleraudais venant du pied de la réserve naturelle du Pinail à Vouneuil-sur-Vienne. À bientôt 30 ans, nous vous proposons de revenir sur son parcours militant.
La Vienne Démocratique : Peux-tu te présenter brièvement. Qu’est-ce qui a conduit à ton engagement ?
Arthur Giry : Je m’appelle Arthur Giry, j’ai bientôt 30 ans. Je suis actuellement en formation professionnelle (CAP cuisine). Normalement, je suis formateur à la chambre de commerce et d’industrie. J’ai une formation d’historien que j’ai réalisé à Poitiers au Centre d’Etudes et Supérieures de Civilisation Médiévale (Master). Mon engagement et mon premier lien avec la politique se sont amorcés suite à mon arrivée à Poitiers au lycée Camille Guerrin à 15 ans. Je me souviens notamment des actions contre le CPE (Contrat première embauche) et dans cette continuité de la lutte contre la loi Darcos et la réforme des lycées, les deux lois LRU (lois relatives aux libertés et responsabilités des universités) en 2009 et 2010 et la réforme des retraites de 2010. C’est durant cette année que j’ai décidé de m’engager en prenant ma carte au parti communiste français ainsi qu’au mouvement jeunes communistes.
VD : Comment arrives-tu à lier ton activité professionnelle avec ton combat politique ?
AG : En temps normal, j’essaie toujours de marcher sur deux jambes : partager mon combat syndical dans mon entreprise et mon activité politique ; je pense que les deux doivent être intimement liés. Cependant, cette année est un peu plus compliquée, travaillant dans un restaurant ce qui laisse peu de temps et de place au militantisme. Malgré ce contexte, j’ai décidé de m’engager cette année dans le collectif la Vienne en transition pour les élections départementales (20-27 juin 2021) où je suis candidat titulaire sur le canton de Poitiers 1. Cet engagement me prend énormément en temps mais c’est un choix personnel que j’ai fais, qui empiète sur ma vie sociale et mon rythme quotidien. Je suis content de mon choix qui me semble important dans cette période particulièrement nauséabonde avec la montée des idées de l’extrême droite, un délitement du pays et une fascisation générale de l’état. Il est important alors de lutter et de s’engager pour proposer une alternative au pays.
VD : Tu as fais partie des premiers militants du renouveau de la JC (Jeunes communistes) de la Vienne, peux-tu revenir sur ce moment les difficultés et les premières victoires politiques ?
AG : Je suis arrivé à la JC début 2010 lors de mon entrée à l’université. La JC a été recréée durant l’automne 2009 par Camille Lainé entre autres, elle était la première coordinatrice départementale. Au début, pour relancer une organisation qui n’existe plus depuis presque 20 ans (1991), nous avons eu la chance d’avoir le soutien de la fédération du parti communiste français avec des personnes comme Yves Jamain, Laurent Lucaud, Pascal Lefebvre, etc. qui nous ont beaucoup aidé, accompagné et donné les moyens de nos ambitions. La première victoire qui m’a marqué était une bataille étudiante. En 2011, nous avons mené une campagne pour la libération de Sevil Sevimli, étudiante Franco-Turque emprisonnée par le régime d’Erdogan. L’UEC (union des étudiants communiste) avait mené une très belle mobilisation, avec des manifestations, un nombre important de pétitions signées, qui a conduit à mettre la pression sur le Quai d’Orsay et donc d’organiser sa libération. Toujours sur l’université, j’ai de très beaux souvenirs de campagnes que nous avons pu mené pour le droit des étudiants avec l’entrée d’élus communistes au sein du conseil d’administration ou des conseils d’UFR. De manière plus large, même si ce n’est pas forcement des victoires, je pense à de belles mobilisations comme les premiers tournois de foot pour Gaza qui ont permis de récolter énormément de fonds afin de financer des installations sportives en Palestine, le très beau lâché de colombe sur la place de l’ancien palais de justice de Poitiers en faveur de la paix en Palestine, la mobilisation de la jeunesse pour la présidentielle de 2012 avec l’espoir du front de gauche, etc…
VD : Tu as succédé à Camille Lainé à la tête de la JC 86, quel est ton bilan politique et personnel de ce mandat ?
AG : J’ai été coordinateur départemental de la Vienne un peu plus de 3 ans (2013-2016). Avant ce mandat, j’étais responsable de l’union de ville de Poitiers. J’en garde un excellent souvenir. J’ai eu la chance d’arriver en responsabilité en 2013 avec une fédération déjà en dynamique et organisée. Et on a continué à se renforcer : quand j’ai quitté mes responsabilités, la fédération comptait entre 60 et 70 camarades. Nous avons continué le travail initié par Camille dans la structuration en nous concentrant particulièrement sur les universités (création de différents pôles et cercles : Campus, SHA, Sciences-Po, etc.). Nous avons mis en place un certain nombre d’activités et d’événements annuels qui perdurent aujourd’hui. Je pense particulièrement au banquet de vœux annuel qui a pu réunir parfois plus de 120 personnes autour de la table, ou les conférences de rentrée à l’université avec des intervenants d’envergure nationale. Je me souviens d’une en particulier, je n’étais plus coordinateur, avec la venue de Marie-Georges Buffet, députée communiste, et Camille Lainé alors Secrétaire nationale du MJCF. Nous avions réuni plus de 200 étudiants autour du féminisme en sciences humaines. Cette expérience de coordinateur a aussi été très enrichissante d’un point de vue personnel. Cela m’a permis de rencontrer des dizaines de personnes qui sont aujourd’hui mes ami.e.s, que je n’aurais pas eu la chance de rencontrer. C’est aussi ça une organisation de jeunesse, c’est un lieu d’éducation populaire, mais aussi un lieu de sociabilisation, un lieu qui permet à des gens ne venant pas du même milieu de se rencontrer, cela crée du lien.
VD : Quelle fonction occupes-tu aujourd’hui au sein du parti communiste ?
AG : Au sein du parti, j’ai commencé à siéger au conseil départemental en 2013 en tant que représentant des JC. J’y suis toujours en tant que membre du parti. Je suis aussi membre du secrétariat départemental qui est l’organisation exécutive qui met en place les décisions du conseil départemental. Et comme j’ai pu dire en introduction, j’ai décidé de sauter le pas cette année à la demande de mes camarades, d’être candidat pour les élections départementales sur le canton de Poitiers 1. Mes fonctions au sein du PCF me conduisent à mener des actions concrètes. Je travaille sur deux aspects. La première est l’aspect financier. Il faut garder à l’esprit qu’une organisation politique a besoin de moyens, je vieille à ce que les communistes du département aient un maximum de moyens pour mener l’action politique. Le deuxième aspect est l’aide à l’organisation au sein de la fédération. Par exemple, cette année je me suis particulièrement investi dans la préparation des élections départementale avec notamment un travail sur le programme de la Vienne en transition.
VD : Quel est ton plus beau souvenir militant et l’événement qui t’a le plus choqué dans ton activité politique ?
AG : C’est les deux en même temps. Mon plus beau souvenir est une très belle action menée avec les JC où nous avons déployé un grand drapeau palestinien sur le viaduc Léon Blum dans le cadre de la journée des prisonniers politiques. Nous avions mené beaucoup d’actions en amont dans la ville, qui ont mobilisé un grand nombre de camarades (pétition, collectes de solidarité, tournoi de foot annuel). En parallèle nous avions interpellé la mairie pour faire reconnaître Marwan Barghouti, député palestinien et l’un des responsables du Fatah emprisonné depuis plus de 20 ans dans les geôles israéliennes, en tant que citoyen d’honneur de la ville de Poitiers, pour soutenir sa libération. C’était un très beau combat que les JC mènent encore aujourd’hui. En effet, ils ont sollicité l’actuelle majorité municipale sur cette question de citoyenneté d’honneur qui ne nous avait pas été accordée par Alain Claeys à l’époque. Ce qui m’avait le plus choqué se sont les réactions en parallèle de cette mobilisation, nous avons été taxé dans la presse d’antisémitisme par ce qu’on avait dénoncé ce que dénonce l’ONU et la cour pénale internationale, c’est-à-dire des violations des droits de l’homme par l’armée israélienne. C’est l’un des moments qui m’a le plus blessé dans mon militantisme, être insulté d’antisémitisme quand on connaît l’histoire des communistes dans la défense du peuple juif. Pour rappel, que ce soit durant la seconde guerre mondiale ou même avant en 1934 avec les ligues et le climat antisémite en France où les communistes avaient organisé une contre-manifestation pour éviter le putsch des ligues. Cela m’a blessé et je trouve que cela dénote ce sur quoi le pays est en train de glisser, c’est-à-dire des mélanges, des collusions et des désinformations. On associe antisémitisme et antisionisme qui est une lutte contre une doctrine politique. On ne fait plus la différence entre un état d’extrême droite israélien et des juifs qui n’ont rien demandé. C’est pour ça qu’en Israël il y a une gauche qui se mobilise contre son gouvernement, qu’il y a en France une association qui s’appelle « Union juive pour la paix » qui se mobilise pour le droit des Palestiniens. C’est un de mes plus beaux souvenirs, mais à la fois le plus dur de mon militantisme.
VD : Un petit mot sur les départementales ?
AG : Je ne vais pas vous rappeler encore une fois que je suis candidat. Dans le département nous avons participé à la construction du collectif de la Vienne en transition qui regroupe quasiment toutes les organisations politiques de gauche, c’est à dire des communistes, des écologistes, et même des candidats issus du parti socialiste et de la France Insoumise et beaucoup de citoyens non encartés. On a créé ensemble un projet alternatif pour le département qui est mal géré par la droite depuis des décennies. Nous sommes la seule force politique à proposer des candidats sur les 19 cantons du département de la Vienne avec un vrai projet qui s’oppose aux choix de la droite. Nous souhaitons remettre au cœur du département ses compétences centrales, à savoir l’éducation avec les collèges et la restauration scolaire, à savoir le social avec l’aide aux personnes âgées, l’aide aux personnes en situation de handicap, le RSA. Il faut arrêter d’avoir un département qui se focalise sur des vitrines commerciales comme peuvent être le Futuroscope, l’Arena ou l’Historial.
VD : Une petite citation et un message pour l’avenir ?
AG : Cela ne sera pas une citation puisque c’est une phrase qui est fortement utilisée, mais qui n’est pas attribuable à quelqu’un en particulier : « seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin ». Mon message est engagez-vous, engagez-vous tous, prenez tout l’espace qui est disponible, tout l’espace politique que l’on vous laisse. Celui qu’on ne vous laisse pas, prenez le, allez le conquérir. C’est par l’engagement que l’on construira la société que l’on veut demain.